Sermons 2015

Spiritualité, moralité et la vie d’ici-bas – sermon du 24-04-2015

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Cinquième Calife de la Communauté Ahmadiyya en Islam

Sermon du vendredi 24 avril 2015, prononcé par Sa Sainteté le Calife, Hadrat Mirza Masroor Ahmad, à la mosquée Baitul Futuh à Londres.

Il est une question qui tourmente plus que jamais les esprits des jeunes d’aujourd’hui. Elle est d’ailleurs souvent reprise par les détracteurs de religion qui, manquant de direction, sont loin de la foi, voire loin de Dieu. Cette question est : « Pourquoi respecter les préceptes d’une religion quand on possède de bonnes valeurs morales ou si l’éducation permet d’en acquérir ? » La religion se donne pour vocation d’enseigner la moralité : c’est le but que lui attribuent les croyants. Les non-croyants annoncent, quant à eux, qu’ils possèdent des valeurs morales sans avoir eu recours à la religion. Ils clament d’ailleurs que la moralité de la majorité des non-croyants est bien meilleure que celle des croyants.

Leurs remarques visent en fait l’Islam. La majorité des adeptes des autres religions, quant à eux, entretiennent avec ces dernières une relation superficielle. Quant aux musulmans, la majorité d’entre eux expriment ouvertement leur appartenance à l’Islam même s’ils ne sont pas pratiquants. On tente d’empoisonner les esprits de nos enfants et de nos jeunes pour mieux les éloigner de la religion. Différentes méthodes sont utilisées à cette fin, en particulier en Occident, où l’éducation met beaucoup d’emphase sur la curiosité [intellectuelle] et la recherche. Certes cette posture est fort louable : la quête du savoir à ses mérites. Or, il faudra avoir recours à la méthode appropriée. Les adolescents, garçons et filles, posent différentes questions à leurs parents, à leurs aînés. Pris par leurs nécessités économiques ou leurs occupations ces derniers n’ont parfois pas le temps de leur répondre. Des fois c’est la connaissance [nécessaire] qui leur fait défaut. Et au lieu de satisfaire la curiosité des jeunes, les grands tentent de réprimer leurs interrogations. C’est ainsi que ces jeunes déduisent que toute religion – ou l’Islam dans notre cas précis – peut annoncer qu’elle repose sur la vérité, qu’elle présente la solution à tout problème, mais elle n’offre pas, en réalité, de solutions pratiques aux enjeux contemporains ou elle n’a pas de réponse à fournir. D’ailleurs bien des disparités peuvent exister entre les actions des aînés et l’éducation impartie aux jeunes. Ces derniers garderont profil bas pour un certain temps : mais dès qu’ils s’affranchiront [de leurs parents], ils s’écarteront de la religion et tomberont dans les filets de ses détracteurs. D’où la présence, parmi les musulmans, de ceux qui ont renié Dieu et la religion, en dépit des beaux enseignements de l’Islam, en dépit de sa vivacité.

Face à ce constat il incombe à nous tous d’observer [tous] les préceptes de l’Islam et de prendre soin de nos générations futures. Sans nul doute l’Islam est la religion parfaite : il offre des solutions à nombre de difficultés. Le Saint Coran est un livre tout aussi complet que parfait : le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) est l’exemple parfait de ses préceptes. Il engendra un changement révolutionnaire dans la vie de ses compagnons. Ceux-ci comprirent les tenants et les aboutissants de la foi ainsi que [l’importance] de la moralité, tout en accomplissant, par la même occasion, des progrès matériels. Cependant, ils comprirent la place de chacun de ces trois éléments que sont la religion, la moralité et le progrès matériel. Il incombe aux jeunes et aux aînés de comprendre la relation qui existe entre la réforme morale, le progrès matériel ainsi que la religion et de calquer leur vie sur ces principes. Les grands en particulier doivent être vigilants à cet effet, car ils sont responsables de la prochaine génération.

Quand les jeunes comprendront ce point, les voies pour leur progrès spirituel et temporel s’ouvriront à eux : ils verront la beauté des enseignements de l’Islam, et comprendront que ses détracteurs ne sont que des menteurs.

Cette polémique que les non-croyants ou les pourfendeurs de la religion ne cessent d’attiser aujourd’hui n’est point une nouveauté. De tout temps ils ont soulevé des questions similaires afin de s’attaquer à la religion, pour la simple raison qu’ils ne se sont jamais évertués à comprendre les tenants de la spiritualité. D’autre part, les prétendus oulémas ont embrouillé [les esprits] des intellectuels avec leurs solutions erronées et fabriquées de toutes pièces ou parce qu’ils n’ont rien compris de la religion.

Allah nous a accordé une grâce immense en envoyant à notre époque le Messie Promis (a.s.) : celui-ci a dissipé toute cette confusion, il nous a facilité la compréhension et l’analyse de ces problèmes.

Le Mousley Maw’oud (r.a.), [le Réformateur Promis et deuxième Calife], a prononcé un sermon à ce sujet : il y explique la relation entre la réforme morale, le progrès matériel et la religion, ce que propose l’Islam ainsi que la pratique du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) à ce propos.

Je vous présenterai ce sujet en profitant de ce sermon. Nous affirmons – et c’est là une vérité – que l’Islam est la religion de la nature humaine envoyée par Dieu.

Le Mousley Maw’oud (r.a.) explique à cet effet : « La religion, la moralité et les besoins physiques de l’homme sont à ce point liés qu’il est impossible de les séparés. Le croyant ne pourra dissocier la moralité de la religion. Il ne pourra affirmer non plus que la religion lui a libéré du monde, lui a affranchi de tout besoin matériel. Dès que l’homme s’imagine qu’il n’a aucun besoin, la roue du progrès humain et matériel cessera de tourner. L’on en déduit que la religion, la moralité et le progrès matériel sont indissociables. Or, en dépit de cette relation il existe des différences entre ces trois éléments. Le non-croyant tentera de s’affranchir de la religion, affirmant que [seuls] les valeurs éthiques et le progrès matériel sont essentiels à l’existence de l’homme. Quant au musulman sincère, il affirmera que la religion est indispensable, car elle mène à Dieu.

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Ainsi, les opinions divergent sur ces trois éléments. Comment établir la relation entre les trois ? Les autres religions sont moribondes et l’Islam est la seule à lier ces trois éléments. Or, les musulmans, dans leur grande majorité, ne saisissent pas ce qu’est la religion. Dans leur ignorance ils attachent, de manière erronée, à la religion toute chose qui a trait à la moralité et à la vie terrestre, tant et si bien qu’ils ont sombré dans l’excès au lieu de présenter la beauté de la religion. Ils sont tout bonnement en train d’éloigner les autres de la religion. Sortant du cercle des actes d’adoration que sont la Salat et le jeûne, les oulémas affirment que les [moindres] aspects de la vie terrestre sont régis par l’Islam, que cela concerne la moralité, les besoins matériels, voire la fondation d’une organisation ou la tenue d’une conférence.

Ils vont jusqu’à affirmer que celui qui ne participe pas dans ces conférences est un mécréant ou un apostat. Voilà ce qui se passe dans le monde musulman : ce concept s’étend à toute chose, on s’accusent mutuellement de mécréants et d’apostats pour ensuite s’entre-tuer. Chaque secte émet ses propres fatwas : différents groupes terroristes commettent des tueries et des atrocités en passant des lois ou en fixant des normes morales pour appliquer leur concept de l’Islam. En Syrie, en Irak, en Afghanistan ou au Pakistan ils font couler le sang, au nom de la religion, avec leurs lois fabriquées de toutes pièces.

J’avais raconté dans le passé l’histoire du journaliste français qui avait vécu en Irak et en Syrie où s’est établi le prétendu état islamique.

Comparant les actions, les lois, et les comportements de ses membres à sa connaissance qu’il avait de l’Islam, il leur expliqua qu’ils transgressaient les préceptes du Coran et des hadiths. Ces agents du prétendu état islamique lui répondirent : « Nous ignorons ce qu’est le Coran et les hadiths. Nous ne faisons qu’appliquer notre loi à nous. » C’est ainsi qu’ils pervertissent les enseignements de l’Islam. Les troubles au Yémen sont du même ordre : les belligérants émettent des fatwas de leur choix afin de bombarder des innocents. Certes l’un des deux opposants est fort probablement fautif. Mais cela n’autorise point le massacre d’innocents.

Tout au long de l’histoire de l’Islam et jusqu’à présent on n’a cessé d’affirmer que tel Sheikh, tel Maulana ou tel ouléma appartient à telle ou telle école de pensée. Chacun a, aurait-on dit, fondé sa propre religion. Au final, l’Islam qu’ils pratiquent est dénué de toute vérité. C’est ainsi que ces musulmans qui suivent ces oulémas et ceux qui lancent ces fatwas s’éloignent de plus en plus de l’Islam. L’on ne peut imaginer les infamies qu’ils commettent au nom de la spiritualité et de la religion. Quant aux non-croyants et aux occidentaux ils tentent d’inclure la spiritualité et la moralité, dans tout ce qui a trait au monde matériel. A titre d’exemple, ils affirment que la révélation est un acte humain. La moralité est, à leurs yeux, nécessaire à l’homme, car il s’y trouve ses avantages matériels. La religion est nécessaire uniquement à ceux qui sont au plus bas de l’échelle sociétale, à ceux qui n’ont pas fait de grandes études, ou qui en ont peu. Car grâce à leur foi et au respect qu’inspire la religion, ils pourront, jusqu’à un certain point, se préserver des délits et améliorer leur état moral, si jamais ils adoptent la vraie religion. Ceux qui, d’ores et déjà, sont imbus de moralité n’ont pas besoin de religion, [affirment les gens de ce monde]. Or, une étude plus poussée démontre que le matérialisme est si proche de la moralité et de la religion, qu’un simple mortel ne pourra en distinguer les confins.

Pour comprendre ce point nous devons étudier la vie de notre Bien-Aimé Prophète (s.a.w.). Il était venu réformer la condition matérielle, morale et spirituelle de l’homme. Sa sainte vie en renfermait tous les aspects.

Si, d’une part il annonçait الدعاء مخ العبادة (que les invocations étaient au cœur de l’Ibadah), il soulignait aussi l’importance de parachever sa spiritualité. Il ne suffit pas d’accomplir la Salat pour que toutes ses difficultés disparaissent, selon lui. Il incombe au musulman de gravir les échelons de la Salat et d’avancer dans la spiritualité. Le دعاء (du‘ā) (la supplication) lie l’homme à Dieu à l’instar de la relation qui lie l’enfant à la mère. Le دعاء (du‘ā) signifie solliciter [l’aide d’autrui]. Or, l’on implore celui dont le soutien est certain : personne n’appelle à l’aide son ennemi.

Le دعاء (du‘ā) est composé de trois éléments, selon le Réformateur Promis (a.s.). Le suppliant doit être convaincu de l’exaucement de sa prière. Deuxièmement, il doit être certain du soutien de celui dont il implore le secours. Troisièmement, il doit éprouver une attraction naturelle, qui le détournera de tout pour le mener vers Allah ou vers l’objet de son amour.

Les deux premiers points sont logiques : il serait absurde et futile d’implorer le secours de celui qui est sourd à l’appel à l’aide ou d’un impuissant.

Le troisième composant est l’attraction ou l’amour naturel. L’exemple cité est celui d’une mère et de son enfant. Celui-ci entretient avec sa mère une relation toute naturelle : même si cette dernière est incapable de l’aider c’est elle qu’il sollicitera pour demander de l’aide. S’il se noie et que sa mère se trouve à proximité, c’est celle-ci qu’il appellera au secours même s’il est conscient qu’elle ne sait pas nager. Cette relation est naturelle et elle repose sur l’émotion. C’est pour cette raison que le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) a déclaré الدعاء مخ العبادة c’est-à-dire que sans le دعاء (du‘ā), la foi de l’homme sera incomplète. La relation entre l’homme et Dieu ressemble à celle entre l’enfant et la mère : il doit, les yeux clos, courir dans sa direction.

Le deuxième élément est la moralité. La vie du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) en est parsemée d’exemples si subtils que sans sa direction ils sont imperceptibles à celui qui est dénué de perspicacité.

Citons l’exemple du bon traitement des épouses et de l’amour à leur égard, des éléments fondamentaux de la moralité et indispensables pour rendre agréable l’atmosphère familiale. Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) était si attentif à l’égard de ses épouses qu’on raconte que s’il buvait dans le même récipient de sa femme il plaçait sa bouche au même endroit qu’elle avait placé la sienne. Apparemment cette action est sans grande importance, mais elle est d’une grande finesse. [Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) nous y] apprend qu’on n’exprime pas son amour pour l’autre uniquement par de grandes œuvres : c’est à travers ces petits actes qu’on le fait véritablement.

Ce n’est pas là le seul exemple [de la vie du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.)]. Sa biographie en regorge un si grand nombre que l’on croirait qu’il avait consacré sa vie entière à l’étude de la moralité et à l’enseigner.

Son exemple et ses préceptes couvrent les relations sociales, celle entre les parents, le caractère de l’homme, l’interdiction du mensonge, de la malhonnêteté, de la suspicion. Personne d’autre ne pourra montrer pareil exemple même si l’on disposait de vingt vies.

Le troisième point concerne la vie terrestre [ou le monde temporel] : là encore le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) nous sert de guide. A titre d’exemple, [il nous explique qu’une] ville doit être dotée de larges voies, qu’il faudra fournir de l’eau propre [à sa population], autant d’aspects que les ingénieurs et les planificateurs prennent en considération quand ils aménagent une ville ou établissent de nouvelles habitations. Il a donné des directives concernant la propreté des voies, l’aération des maisons. Il a attiré notre attention concernant d’autres aspects de ce monde temporel, la gestion des affaires de l’état, la société, le commerce, l’industrie. Or, il n’a point affirmé, à l’instar des leaders religieux d’aujourd’hui, que tous ces aspects [de la vie] font partie intégrante de la religion.

En voici un exemple. Un jour il passa devant des planteurs qui fécondaient les fleurs femelles des dattiers avec les parties mâles de cet arbre. En effet les fleurs mâles et femelles du dattier se trouvent sur des arbres différents. Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) leur demanda : « Pourquoi faire cette opération manuellement ? Pourquoi ne pas laisser le vent effectuer la pollinisation ? » Sur ce les planteurs cessèrent d’avoir recours à la pollinisation manuelle cette année-là. Or, la récolte suivante était très maigre et le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) leur en demanda la raison. Ils expliquèrent : « O Prophète d’Allah ! Vous nous aviez interdit de féconder les plantes femelles ! » Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) répliqua : « Je n’ai pas donné d’ordre à ce sujet ! Vous avez une meilleure connaissance que moi des choses de ce monde ! »

Le Mousley Ma’oud (r.a.) dit : « Ici le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) a distingué le monde matériel du domaine de la religion. La langue qui annonçait qu’il n’était pas nécessaire de féconder manuellement ces plantes était la même qui proclamaient les commandements divins. Or, le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) plaça dans le domaine temporel ce qui a trait à cette vie terrestre en disant aux agriculteurs qu’ils connaissaient le mieux leur métier. Cependant si les mollahs d’aujourd’hui prononcent des inepties celui qui les rejettera sera, selon eux, hors du giron de l’Islam, un mécréant et un apostat.

A l’autre extrémité se trouve la société occidentale ou ces prétendues sociétés développées. Selon ceux qui y vivent il n’est point nécessaire d’accepter la religion, d’honorer ses préceptes ou respecter la moralité. A leurs yeux tout est lié au monde matériel. Tant est si bien que le deuxième Calife explique que la question que se posaient les philosophes [occidentaux] n’était pas de savoir comment Dieu a créé l’univers, mais comment l’homme a créé Dieu ! (Qu’Allah nous en préserve !)

Selon eux la croyance en l’existence de Dieu est le résultat final de l’évolution psychologique de l’homme. Ce dernier, affirment-ils, était en quête d’un exemple parfait. Quand il n’en trouva pas auprès de ses congénères, il se fabriqua un être imaginaire qui appartient à une autre dimension. Sa première tentative fut sans succès : et il ne cessa d’avancer dans sa pensée jusqu’à ce qu’il produisit au final un être parfait à qui il donna le nom de « Dieu ». Selon des philosophes du passé et du présent, c’est de là que découle le concept de Dieu. C’est ainsi qu’ils ont placé Dieu dans le domaine du temporel.

Les philosophes qui ont succédé à ceux qui ont fabriqué de toute pièce ce Dieu imaginaire se sont éloignés peu à peu de la religion pour sombrer dans l’athéisme. D’ailleurs la plupart de ceux qui vivent en Occident nient l’existence de Dieu au nom de la science et de l’ouverture d’esprit. Les seules choses qui comptent sont la moralité et le progrès matériel.

Les oulémas d’aujourd’hui, quant à eux, ne cessent de propager leurs inepties et d’enflammer les préjugés des athées, affirmant que tout aspect [de la vie] ainsi que leurs opinions font partie intégrante de la religion. Les mollahs d’aujourd’hui se fourvoient, ainsi que ceux qui croient que la religion fait partie du monde temporel et qui la rejette.

Nous sommes chanceux en tant qu’ahmadis, car le Messie Promis (a.s.) nous a préservé de ces errements, nous guidant vers la méthode à suivre afin de saisir cette réalité : notamment qu’il faut se tourner vers le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.). Celui-ci nous recommande de faire preuve de justice en toute chose et de nous acquitter de nos devoirs. C’est cela la vraie foi.

Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) affirme que l’adoration de Dieu est essentielle car elle est le but même de l’existence de l’homme. Or, il affirme aussi : « Votre personne à des droits sur vous, votre épouse à des droits sur vous, votre voisin à des droits sur vous. »

Pour nous acquitter de ces devoirs ayons recours aux trois méthodes suivantes. La première est le دعاء (du‘ā) : le fait de se prosterner devant Allah, de lui rendre culte. La deuxième méthode est de maîtriser son moi et ses émotions et de méditer sur la psychologie humaine. La troisième est de faire preuve d’intégrité dans ses œuvres et sa profession. Pour ce faire il faudra acquérir les connaissances de ce monde et de la science.

Ainsi il est essentiel de prier et d’établir une relation vivante avec Dieu si l’on désire s’acquitter de ses devoirs envers sa personne. Il est tout aussi essentiel de maîtriser ses émotions. Si on laisse libre court à ses émotions on ne s’acquitte plus de ses devoirs envers soi-même ou l’on fait preuve de cruauté à l’égard d’autrui. C’est en augmentant sa connaissance, en faisant preuve d’honnêteté, que l’on pourra embellir l’état spirituel, moral et matériel de son existence.

De même afin de s’acquitter de ses devoirs envers les membres de sa famille, il faudra recourir à la prière, maîtriser ses émotions, et subvenir à leurs besoins matériels.

Le Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) affirme que nos voisins ont des droits sur nous. C’est-à-dire que nous nous acquitterons de nos devoirs envers la société quand nous prierons pour elle, quand nous respecteront nos obligations envers elle, quand nous comprendrons sa psychologie, et quand nous lui transmettrons le message de l’Islam.

Quand collectivement nous augmenteront notre connaissance et nous fournirons l’effort nécessaire, nous contribuerons au progrès du pays. Ceci tombe aussi dans la catégorie des devoirs à l’égard des voisins et envers de la nation. Quand tous les membres de la société œuvreront en ce sens ils serviront d’exemples du progrès spirituel, moral, et matériel.

Les musulmans sont aujourd’hui dans une situation déplorable parce qu’ils ont négligé les points évoqués plus haut, en accordant préséance à [leur concept de] Dieu et à ce qu’ils ont défini comme « religion », qui n’est rien d’autre que le reflet de leurs penchants égoïstes. Ils n’ont pas accordé préférence à la religion révélée par Dieu, car s’ils l’avaient fait ils auraient été conscients des autres exigences (à respecter). Comment pourront-ils présenter aux autres les beautés de l’Islam ? Ils sont en train de s’entre-tuer en suivant la « religion » de leurs penchants égoïstes. Ils ont perdu [les faveurs] spirituelles, ainsi que [les faveurs] temporelles. Pour se sortir d’affaire [quand ils sont en difficulté] ils quémandent le soutien des gens de ce monde. Voilà l’état du monde musulman aujourd’hui.

Certes la société occidentale a, quant à elle, assujetti le spirituel au temporel : la religion [et la spiritualité] n’ont pas lieu d’exister pour elle. Or, quoiqu’ils sont égarés les [athées] d’Occident ont, tout de même, atteint leur objectif, en acquérant les biens de ce monde, bien qu’ils aient eu à des moyens condamnables. Mais les musulmans, quant à eux, ont perdu la religion et le monde.

En ces temps Allah a envoyé le Messie Promis (a.s.) afin de réformer ces deux catégories de personnes. Quand prévaut pareille situation, Il envoit Ses messagers pour guider les hommes, afin qu’ils placent la religion, la moralité et le monde à leurs places respectives. Apparemment ils portent un message d’ordre spirituel : mais ces trois composants sont en étroite relation. C’est en perfectionnant sa spiritualité que l’on pourra corriger son état moral, et c’est en étant attentif à son état moral que l’on pourra réformer sa condition matérielle.

Celui qui profite d’une bonne situation matérielle ne jouit pas nécessairement d’une bonne condition morale. Celui dont la condition morale est bonne ne jouit pas nécessairement d’une bonne santé spirituelle. La raison est qu’Allah désire guider l’homme dans sa direction : c’est le but de sa création. D’où la raison pour laquelle il a asservi la réforme de la condition morale ainsi que le progrès matérielle à la condition de la foi. Allah affirme que le véritable croyant peut accomplir tous ces progrès. Quant à ceux qui s’adonnent au matérialisme, leurs efforts sont complètement perdus à la poursuite des choses se rapportant à la vie de ce monde, comme l’affirme Dieu. (18 : 105)

Selon le deuxième Calife, celui qui accordera priorité à la spiritualité aura à sa disposition des escaliers pour descendre vers le temporel ; mais il n’y en aura pas pour celui qui, de la sphère matérielle, voudra atteindre le domaine du spirituel.

Les méthodes pour atteindre ces trois milieux sont différentes. Sauf qu’il existe un moyen commun, qui est la communion parfaite avec Allah. Celui qui tentera d’atteindre la sphère de la moralité réussira au bout du compte, à l’instar de celui qui tentera de profiter [des bienfaits] matériels. Or leurs efforts seront limités à leur domaine respectif. Quant à celui qui visera sa réforme spirituelle, il réussira dans tous les domaines.

Dans leur allégeance au Saint Prophète Muhammad (s.a.w.) les compagnons ne promettaient pas de maintenir la propreté des rues ou de se soucier d’autres aspects du monde matériel. Ils se contentaient de réciter la formule « Nul n’est digne d’être adoré excepté Allah et Muhammad est Son prophète. » Ils réformaient, grâce à cette formule, leur condition morale et sans nul doute leur condition matérielle.

Les musulmans de l’époque étaient des exemples de véridicité. En raison de leur honnêteté les gens de ce monde leur confiaient sans hésiter leurs commerces. En raison de leur équité à l’égard de leurs sujets, les populations désiraient que les musulmans soient leurs souverains. A l’époque du Calife Omar, les musulmans furent contraints d’abandonner la Syrie, car l’armée byzantine était plus nombreuse, rendant la lutte inégale. Or, les populations [chrétiennes], qui vivaient sous l’autorité des musulmans, supplièrent ces derniers de rester. « Nous vous aideront à combattre l’ennemi », assurèrent-ils aux musulmans, alors qu’ils étaient des chrétiens à l’instar des Byzantins. Ce fut la noblesse de caractère des musulmans et leur bonne gestion des affaires de l’état qui poussèrent ces chrétiens de la Syrie à se soulever contre une puissance chrétienne.

Certes cette souveraineté-là ne concerne que cette vie terrestre. Mais le pouvoir des musulmans n’est point de ce monde : ils le reçurent par le truchement de la religion et dépendait de celle-ci. D’où ces excellences, d’où le souhait des chrétiens que des musulmans restent au pouvoir en dépit de leur différence de doctrine.

Les musulmans reçurent cette souveraineté par l’entremise de la formule « Nul n’est digne d’être adoré excepté Allah et Muhammad est Son prophète. » Mais ce n’était pas là une simple déclaration verbale, car celui qui s’en contente perd [les faveurs] de ce monde. Celui qui suit la vraie religion arrive, quant à lui, à réformer sa condition morale et matérielle.

Si seulement les dirigeants musulmans appliquaient ce principe dans la gestion des affaires de l’Etat.

Le Messie Promis (a.s.) racontait l’histoire d’un négociant pour illustrer la relation entre le croyant et Dieu. Ce commerçant, qui partait en voyage, avait confié en dépôt une somme importante au juge de sa ville. Après son retour il lui réclama sa bourse. Le juge feignit l’ignorance affirmant que l’autre ne lui avait confié aucune somme. « Elle était comment ta bourse ? Combien m’avait-tu confié ? », lui demanda le juge. Le commerçant décrivit de son mieux la bourse en question. Mais le juge répliqua « Je ne converse aucune somme de personne. »

Le commerçant était fort inquiet. Un de ses amis lui conseilla de plaider son cas dans la cour du roi. Etant donné qu’il n’avait pas de preuve à sa disposition, le roi déclara qu’il ne pourrait rien entreprendre contre le juge. Il lui présenta cependant la solution suivante : « Je sortirai en ville tel jour. Tiens-toi à côté du juge. Tous les notables seront présents pour m’accueillir dans la rue. Je m’approcherai de toi et je converserai avec toi comme si tu étais mon ami. Tu devras en faire de même. N’aie pas peur de moi. Je te demanderai de tes nouvelles, du fait que je ne t’ai pas vu depuis fort longtemps. Tu m’informeras que tu étais parti en voyage et qu’à ton retour il eut ce différend financier entre toi et un autre. Je te dirai, devant le juge, que tu aurais dû m’en informer. Et tu répondras que si tu ne trouve pas de solution bientôt tu me confieras l’affaire. »

Le jour convenu le commerçant suivit [à la lettre] le conseil du roi. Quand ce dernier le quitta le juge vint le voir et lui dit : « Tu étais venu me voir il n’y pas longtemps et tu mentionnais une somme que tu m’aurais confiée. J’ai une mauvaise mémoire. Donne-moi quelques indices afin que je puisse m’en souvenir. »

Le commerçant lui répéta les mêmes détails qu’il lui avait présentés auparavant. Le juge lâcha sur-le-champ : « Pourquoi ne tu m’as raconté tout cela plus tôt ? Ton argent est avec moi. Je te le retourne à l’instant ! »

Si l’amitié d’un roi de ce monde, dont le pouvoir est limité, peut conférer pareil statut à un autre, tant et si bien que des notables en prennent peur, comment serai-ce possible que le monde ne tombe pas aux pieds de celui qui jouit de l’amitié de Dieu ? Quand l’homme suit la vraie religion il acquiert les faveurs de ce monde.

Les compagnons avaient mérité ces faveurs par l’entremise du Saint Prophète Muhammad (s.a.w.), en suivant les préceptes de la religion et non pas par des moyens mondains. Pour attirer les faveurs divines il faut posséder une foi de cette envergure. Comment celui qui en est récipiendaire pourra abandonner les hautes valeurs morales ? Si l’homme respecte toutes les conditions de la moralité il sera à la fois véridique et honnête, [il respectera les exigences de] la taqwa et celle de la pureté. Il sera savant, habile, intelligent, compétent et appliqué. Il acquerra, au final, les biens de ce monde.

La priorité du croyant est sa condition spirituelle : il ne doit pas se contenter de simples déclarations verbales. C’est avec le cœur, et non la langue, que l’on exprime son amour pour Dieu. L’homme sera maître de toute chose quand il agira ainsi. La perfection est la condition essentielle pour mériter quelque récompense. L’on méritera des faveurs parfaites qu’en acceptant la religion.

Le Messie Promis (a.s.) affirmait que seul celui qui établit une relation avec lui profitera de sa personne. On devra, soit lui vouer une fidélité [indéfectible] soit lui être farouchement opposé, à l’instar du Mollah Sanaullah. Quant aux autres petits mollahs [qui n’e s’opposent pas au Messie Promis (a.s.)] personne ne se soucie de leur existence.

Une relation superficielle ne sera d’aucune utilité.

C’est en se tournant sincèrement vers Dieu que le croyant d’aujourd’hui méritera le traitement accordé à ses prédécesseurs. Dieu ne nourrit aucune l’hostilité à l’encontre de personne. L’essentiel c’est de nous consacrer à lui corps et âme. Si nous tombons devant Son seuil nous recevrons toutes les faveurs et tous les progrès que nous méritons. Quand on se place devant le feu on réchauffe tous les membres de son corps. Comment est-ce possible que l’homme abandonne tout pour se placer entre les mains de Dieu pour ensuite ne pas profiter des faveurs divines ? Nous devons ainsi nous évertuer à atteindre Dieu, à comprendre Sa religion, de faire de Son amour un élément naturel de notre vie.

C’est ainsi que nous atteindrons les sommités de la moralité, et du progrès matériel. Si nous tentons de profiter de la lumière divine nous mériterons ces faveurs : si nous nous évertuons en ce sens, tous ces maux que sont le mensonge, la paresse, l’imposture, la fraude et l’usurpation disparaîtront. Nous profiterons de la lumière divine, nous progresserons dans le domaine moral et matériel. Si, tout en vivant dans cette société nous désirons préserver nos générations futures de effets néfastes du matérialisme, nous devrons les lier à la religion : ils saisiront la relation qui existe entre la foi et la moralité, ils comprendront que le progrès matériel dépend de la vraie religion. Qu’Allah nous accorde la possibilité d’établir cette relation sincère avec lui.


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